Penser les rapports entre temps et politique amène d’emblée le chercheur sur un terrain fertile et pluridisciplinaire. Les concepts d’historicité et de temporalités permettent cependant d’en appréhender plus précisément les enjeux actuels en communication politique.
Le temps est d’abord, dans une perspective ontologique, au fondement de toute représentation et subjectivation :
« Il n y a de présent (humain) qu'en tant que ce présent a un avenir et deviendra lui-même un passé [...] : l’homme vit toujours en avant de lui-même, dans le dépassement de lui-même : si bien que l’historicité paraît d'abord être inverse de l’histoire, car l'histoire n'est-elle pas la connaissance du passé, tandis que l'historicité se réfère à l'avenir ? » (Bréhier, 1950 : 154-155).L’historicité, ainsi comprise comme écart entre un « champ d’expérience » et un « horizon d’attente » (Hartog, 2012 : 39) a longtemps fondé les grands récits et la promesse politique. Or, de nombreux chercheurs se sont interrogés sur les conséquences de la fin de ces grands récits, sur la formation des identités et des rapports sociaux (Chesneaux, 1996 ; Muxel, 2016 ; Freitag, 2001). Le post-modernisme semble avoir enfermé l’homme dans un « présentisme éternel » (Hartog, 2003), sorte d’« état d’immobilité hyperaccélérée » (Rosa, 2012).
« la volatilité électorale, la désidéologisation, l’affaiblissement des alignements partisans et la montée de l’incertitude du choix jusqu’aux dernières heures avant d’entrer dans l’isoloir, voire dans l’isoloir même, ont conduit les sondeurs à perdre leurs repères » (Mercier, 2004).La question de l’influence de ce morcellement du temps des pratiques communicationnelles sur leur étude préoccupe également les sciences sociales. Comment les chercheurs en communication politique s’adaptent-ils à ces évolutions essentielles de leur objet d’enquête ? Philippe Aldrin et Nicolas Hubé proposent de recourir à l’hypothèse « continuiste » qui consiste à replacer ces transformations dans le cadre des structures profondes des régimes démocratiques modernes. Il s’agit alors, pour le chercheur, de « déjouer l’éventuel effet de focale » (2004 : 171) qui consisterait à n’analyser les transformations du politique qu’à partir de ses moyens et stratégies. Cette invitation continuiste s’accompagne d’une conception élargie des mondes de la communication publique et politique, postulant la pluralisation du secteur et « mobilisant les notions de coproduction, d’interdépendance et de rationalisation afin d’en saisir les arrangements relationnels » (ibid.).
ACHACHE Gilles
« Le marketing politique », dans Arnaud MERCIER (dir.), La Communication politique, Paris, CNRS Éd., coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2017.
BAYGERT Nicolas
Le réenchantement du politique par la consommation. Propriétés communicationnelles et socio-sémiotiques des marques politiques, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, 2015.
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Introduction à la lecture de Hegel : leçons sur la Phénoménologie de l’Esprit professées de 1933 à 1939 à l’École des Hautes Études, Paris, Gallimard, 1980.
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SCHARPF Fritz W.
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Associés au programme de ce troisième colloque PROTAGORAS, plusieurs chercheurs du GRIPIC (Groupe de recherches interdisciplinaires sur les processus d'information et de communication – Paris IV-Sorbonne - CELSA) apporteront leur contribution scientifique au projet d'approche interdisciplinaire.
Les propositions doivent nous parvenir
Outre un résumé de 1 000 à 1 500 signes (au format .doc), les propositions devront comporter : le nom, le statut professionnel ou académique, le rattachement institutionnel, les coordonnées du ou des auteurs (adresses électronique et postale).
Les propositions de communications peuvent se présenter soit comme des analyses réflexives fondées sur des recherches empiriques récentes et achevées, soit comme des analyses de pratiques professionnelles en communication – témoignages de pratiques et réflexion sur les conditions de l’action, les justifications de l’action et les conséquences sur l’action.
Après un examen des propositions en double aveugle, le comité d’organisation retournera son avis aux auteurs le 20 avril au plus tard.
Les frais d’inscription et de participation s’élèvent à 30 euros.
Nicolas BAYGERT
Docteur en sciences de l’information et de la communication (Université Paris IV-Sorbonne/UCL), Chargé de cours (IHECS, ULB, CELSA, Sciences Po Paris).
Esther DURIN
Doctorante en Sciences du langage (UPV – Montpellier 3 / laboratoire Praxiling), Chargée de cours à l’IHECS.
Adrien JAHIER
Docteur en Sciences de l’Information et de la Communication, (Université de Toulouse/CERTOP), Chargé de cours (Université de Mons), Protagoras (IHECS).
Élise LE MOING-MAAS
Professeur et Présidente de la section Relations publiques de l’IHECS, Protagoras (IHECS) et ReSIC (ULB).
Loïc NICOLAS
Docteur en langues et lettres (ULB), collaborateur scientifique Protagoras, formateur IHECS/Institutions européennes.